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Poésie
À MOTS DÉLIÉS
L'estomac noué, elle a ouvert la boîte.
Comme on plonge dans une eau trouble,
À la recherche de son double :
Le cœur battant et les mains moites.
Ce n'était rien qu'une boîte en carton.
Un emballage de rien du tout,
Une vieillerie qui avait reçu des coups,
Usée, anonyme et sans prétention.
Elle contenait juste quelques bricoles :
Deux lettres, un carnet rempli de croquis,
Des tickets de rationnement sur du papier gris,
Une carte d'identité, des photos d'école...
Le résumé d'une vie trop courte,
Abrégée par la guerre et la maladie.
Des souvenirs de rêves trop tôt enfuis,
D'une jeunesse fauchée en cours de route.
Sa voix laissait percer tant d'émotion...
J'ai compris tout le poids de l'absence.
Les regrets, la recherche d'un sens
À cette soudaine disparition...
Sans sourire, mais sans trembler,
Elle s'est mise à raconter. À cœur ouvert.
Je l'ai écoutée faire revivre son frère
Et ma main a couru sur le papier. À mots déliés.
MOURIR DEMAIN
Si je devais mourir demain
Je voudrais que personne ne pleure
Qu'on agite simplement la main
En se disant « c'est l'heure ! »
Qu'on entonne un gai refrain
Qu'on n'ait surtout pas peur...
Si je devais mourir demain
Je voudrais qu'il y ait des rires
Comme aux portes d'un train
Lorsqu'on sait qu'on va revenir,
Qu'on effleure juste ma main
En évoquant de bons souvenirs
Et qu'on ne regrette rien.
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