En formation dans un centre d’apprentissage, au début des années 1950, alors âgé de dix-sept ans, Monsieur Q. logeait dans une petite chambre.
Dans l’immeuble qui lui faisait face, de l’autre côté de la rue, il y avait une jeune fille. Les fenêtres ne disposant ni de volets, ni même de rideaux, Monsieur Q. me raconte comment, chaque soir, il assistait à ses préparatifs pour la nuit.
— C’était ma petite récréation, s’amuse-t-il. Je m’arrêtais de travailler, le temps de la regarder se déshabiller…
Il me raconte aussi comment il a passé des heures à la guetter pour essayer de la rencontrer. Se précipitant dans les escaliers lorsqu’il la voyait sortir de chez elle. Patientant longuement devant la porte de son immeuble…
— Nous ne nous sommes jamais croisés. À croire qu’elle aussi me guettait, mais pour m’éviter… On peut être tellement naïf quand on est jeune !
Comme l’écrivait si joliment Arthur Rimbaud :
On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
Mais près de soixante-dix ans plus tard, il suffit d’une image, d’une odeur ou d’un soupir pour retrouver la légèreté de cet âge. Et pour moi, c’est un privilège d’assister à vos retrouvailles avec les doux frissons de la jeunesse 🙂