Les 15 derniers jours (9)

Cette histoire a commencé là : http://www.amotsdelies.com/blog/2012/12/les-15-derniers-jours-1/

Cordon de CRS

Devant elle, un cordon de CRS obstrue le passage. Alignés comme à l’entraînement, casqués, à l’abri derrière leur bouclier, ils se ressemblent tous. Muets et menaçants, sans faire le moindre geste, juste par leur présence, ils la forcent à reculer.

Un pas, deux pas, trois pas…

En face, les CRS n’ont pas bougé. Éloïse reprend lentement son souffle en s’appuyant aux portes et ses idées s’éclaircissent.

« Il se passe quelque chose de pas normal… Les CRS n’ont rien à foutre ici ! »

Comme si elle avait parlé à voix haute, la réponse à son interrogation implicite résonne soudain dans le couloir.

« Une bombe a été signalée dans nos locaux. Veuillez quitter l’établissement, tranquillement et en bon ordre. Les démineurs sont arrivés et procèdent aux vérifications d’usage. »

Soit. Mais que font tous ces CRS dans l’entrée ? Ils empêchent les étudiants d’entrer… ou sont là pour éviter que d’éventuels poseurs de bombe déjà en place ne quittent les lieux ? Car derrière eux, au fond du couloir, il y a des gens. Un petit groupe se rapproche d’ailleurs de l’entrée. Ou plutôt, pour eux, de la sortie.

Toujours appuyée aux portes, Éloïse les regarde approcher. Que va-t-il se passer lorsqu’ils vont atteindre les rangs de CRS ? Va-t-on les laisser passer ou les retenir à l’intérieur ?

Ni l’un ni l’autre, apparemment : un agent de sécurité apparaît soudain, émergeant d’une porte latérale, et fait obliquer tout le monde vers une autre aile du bâtiment.

Les gens s’exécutent tranquillement, en discutant ou en pianotant sur leur téléphone. Éloïse les scrute, à la recherche de Manue… Mais c’est un autre visage qu’elle repère tout à coup.

« Ambroise ! »

Le cri a jailli de sa gorge avant même qu’elle soit sûre de l’avoir reconnu.

Le jeune homme, à dix mètres, tourne la tête vers elle et lui adresse un signe de la main avant de disparaître à la suite des autres. Éloïse en pleurerait de rage…

 

Devant elle, les hommes en bleu n’ont pas bougé. Ils forment toujours un bloc compact infranchissable. Derrière elle, une voix s’élève.

« Ne restez pas là, Mademoiselle. Vous l’avez entendu : il faut quitter l’établissement. »

L’homme qui vient de lui adresser la parole semble avoir compris son désarroi. La prenant doucement par le bras, il la conduit à l’extérieur. Éloïse ne se sent pas la force de réagir et le suit sans broncher.

« C’est trop con…

— Vous dîtes ?

— Rien, s’excuse-t-elle. Je suis fatiguée…

— Ne vous inquiétez pas ; vous le retrouverez, votre ami.

— Comment pouvez-vous en être aussi sûr ? Il y a plusieurs jours que je le cherche. Chaque fois, c’est la même chose : je l’aperçois, mais je n’arrive pas à le rejoindre. »

L’homme sourit.

« Il faut lâcher prise de temps en temps ! »

Et s’inclinant légèrement en un salut très protocolaire, il s’éloigne.

Lâcher prise… Il en a de bonnes, lui ! Ce n’est pas lui qui cherche Ambroise désespérément… Néanmoins, Éloïse se sent tout à coup comme soulagée d’un poids : il y aurait bien une solution. Une possibilité de retrouver celui qu’elle cherche. Ou plutôt, de le faire venir à elle.

Il suffirait d’arrêter de le vouloir.

Facile à dire ! Moins facile à faire…

 

Au début de l’année scolaire, la jeune fille avait participé à un séminaire sur la méditation organisé par l’université. Curieuse d’aller plus loin, elle avait pris l’habitude, par la suite, de méditer chaque jour une bonne demi-heure.

Dans son petit appartement, un coussin posé sur un tapis constituait son espace de méditation. Elle s’y installait, face au mur, un bâtonnet d’encens devant elle… et y restait jusqu’à ce que les dernières volutes de fumée aient disparu. C’était le signal de fin de séance.

Pendant deux mois, elle avait réussi à s’astreindre à cette routine. Pas complètement persuadée d’y gagner quelque chose, mais suffisamment intéressée pour avoir envie de continuer. Curieuse de comprendre : les gens qui pratiquaient depuis longtemps étaient tellement enthousiastes… Cela devait bien être positif, d’une manière ou d’une autre…

Et puis les messagers avaient commencé à s’agiter. Manue était devenue quasi omniprésente dans sa vie. La méditation n’avait pas résisté aux chamboulements qui s’annonçaient.

« Il faudrait que je m’y remette… Qui sait, cela fera peut-être apparaître Ambroise ? »

Saisie d’un regain d’optimisme, Éloïse s’éloigne d’un pas léger, un sourire aux lèvres, quand elle entend soudain quelqu’un qui l’appelle.

À suivre

 

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