Cette histoire a commencé là : http://www.amotsdelies.com/blog/2012/12/les-15-derniers-jours-1/
« Éloïse ! Attends-moi ! »
C’est Manue. Apparue de nulle part, elle arrive en courant. Seule.
« C’est une histoire de fous, commence-t-elle dès qu’elle a repris son souffle. On allait commencer le meeting dans l’amphi quand le doyen s’est pointé. Le doyen en personne, t’imagines ? On ne l’a jamais vu dans les locaux !
— Et qu’est-ce qu’il voulait ?
— Nous demander d’évacuer. Il paraît qu’il y a eu une alerte à la bombe.
— C’est ce que j’ai entendu dans le hall. Il y avait tout un cordon de CRS qui empêchait les gens d’entrer… Mais au fait, comment tu es sortie, toi ? »
Manue affiche un sourire satisfait.
« Oh, moi, je connais la fac par cœur… Je sais où il y a des portes qui ne sont jamais fermées. D’ailleurs… »
L’éclat soudain d’une explosion stoppe net ses explications.
« Merde ! »
Du bâtiment que les jeunes filles viennent de quitter, des cris s’élèvent en même temps que de la fumée. Des bruits de verre brisé semblent se répondre en écho tout autour de la bâtisse.
« Il y avait beaucoup de monde à l’intérieur ? s’inquiète Éloïse.
— Des centaines ! Comme à chaque meeting ! Tu sais bien ce que c’est…
— J’imagine surtout la panique que ça doit être maintenant… »
À l’idée de toutes ces personnes prises au piège, la jeune fille se sent assaillie par le vertige. Une question s’impose à elle : et si tout cela était volontaire ? Les messagers ne sont pas bien vus des autorités : ils poussent les gens à la transgression, voire à la rébellion. Leur multiplication devient un sérieux problème. Il n’y a qu’à voir comment les cours ont, de fait, cessé.
Alors, que se passera-t-il le 22 décembre ?
Comment une vie normale pourrait-elle reprendre sur le campus (et ailleurs) après des semaines de délire plus ou moins organisé ? Quand on a pris goût à la désobéissance et au chaos, revenir en arrière n’est jamais facile.
« Tu délires, s’emporte Manue. Je viens de te dire que le doyen lui-même est venu nous dire d’évacuer. S’il avait eu la moindre certitude qu’il y avait effectivement une bombe, il aurait fait venir quelqu’un d’autre.
— Pourquoi ? Tu n’es sûrement pas la seule à connaître les portes qui restent toujours ouvertes. Lui aussi doit savoir par où il est possible de sortir, quelles que soient les circonstances. Même quand un cordon de CRS bloque la sortie principale.
— Tu ne m’avais pas dit qu’ils étaient là pour empêcher les gens d’entrer ?
— Ils ne m’ont pas laissé entrer, effectivement… Mais qu’est-ce qui te dit qu’ils auraient laissé quelqu’un sortir ? Ils pouvaient bloquer le passage dans les deux sens. »
Les deux amies se regardent en silence de longues minutes. Finalement, Manue hausse les épaules.
« Je me casse.
— C’est ça… Va jouer ailleurs ! »
L’agressivité à peine contenue de ses mots surprend Éloïse elle-même. Toute cette histoire lui met les nerfs à fleur de peau.
À l’entrée du bâtiment, le cordon de CRS s’est disloqué. Certains sont toujours là, attendant manifestement des ordres, mais la plupart d’entre eux ont disparu. Éloïse en profite pour se faufiler à l’intérieur.
Les couloirs sont pratiquement déserts. Une espèce de brouillard (les restes de la fumée qui a suivi l’explosion) les a envahis. Plus personne ne crie ; le silence est irréel.
Où donc a eu lieu l’explosion ? Et qui en est à l’origine ?
À l’approche de l’amphi B, le brouillard semble s’épaissir. Il faut croire que c’est là qu’il y a eu une bombe.
Des gens sont adossés au mur, l’air secoué. Certains composent fébrilement des messages sur leur téléphone. Envie de rassurer leurs proches ou besoin de raconter ce qui vient de se passer ?
« Tu as vu quelque chose ? demande-t-elle à un jeune homme qui range son appareil.
— Même pas ! se lamente-t-il. C’était bien la peine d’être là !
— Mais tu as entendu l’explosion ?
— Évidemment ! Il aurait fallu être sourd pour ne rien entendre ! »
Continuant d’avancer, Éloïse atteint finalement les portes de l’amphi. Ou plutôt ce qu’il en reste, car elles ont tout bonnement volé en éclats, blessant plusieurs personnes sur leur passage.
Les pompiers sont arrivés, les services de secours aussi. Tous sont à pied d’œuvre et indifférents à la jeune fille. Éloïse en profite pour se faufiler encore plus loin et tenter de comprendre…
L’amphi est toujours plein de monde. L’étonnement et l’incompréhension, plus que la peur, sont sur tous les visages. Quelqu’un aurait voulu hâter la fin du monde ? Cela n’a pas de sens… Au contraire, tous ceux qui viennent assister aux réunions des messagers sont là pour rêver au début d’un autre. Ce ne sont pas des terroristes !
Eux non, mais il y a certainement des gens qui voient dans cette fin du monde annoncée une excellente opportunité de tout casser. Ou de faire le plus de dégâts possibles. Des extrémistes, il y en a partout. Des gens qui ont envie de se faire remarquer aussi. D’autres, qui rêvent juste de faire parler d’eux (quel que soit le moyen utilisé) également.
Bref, cette explosion peut être le fait de n’importe qui, ou presque. En tout cas, pas une seconde Éloïse n’imagine qu’elle puisse être accidentelle. Même lorsqu’un pompier s’exclame :
« Il y a une conduite de gaz qui a pété ! »
Ce qui peut être une conséquence de l’explosion, tout aussi bien que son origine.
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